Penseur

jeudi, mars 29, 2007

Actualité scientifique - 2

  • On en parle de plus en plus : grâce à sa puissance de calcul, la nouvelle Playstation est un outil de recherche scientifique fantastique. Les laboratoires qui font de la simulation (en science des matériaux, en biologie, ...) ou du calcul massivement parallèle (intelligence artificielle, climatologie, ...) se frottent les mains. Pour quelques milliers d'euros, ils peuvent s'offrir un rack de PS3 qui a la puissance d'un supercalculateur cent fois plus cher. Il faut juste avoir un geek dans l'équipe pour savoir la programmer... Et pour encore plus de puissance (mais pas plus de facilité à programmer), certains labos se lancent même dans le calcul sur carte graphique. Les derniers monstres de NVidia sont optimisés pour le calcul parallèle, requis pour l'affichage des derniers jeux vidéos - et se révèlent parfaits pour les applications scientifiques ! Comme quoi, il faut toujours avoir un geek sous la main...

  • L'OMS et Onusida recommandent la circoncision pour lutter contre l'épidémie de Sida en Afrique. Je suis très étonné de cette recommandation, qui rejoint les préoccupations que j'exposais ici : des études ont été menées, et montre que la circoncision "confère un taux de protection d'environ 60 % vis-à-vis de l'infection par le VIH". Il est donc légitime de dire d'un point de vue scientifique que la circoncision permet de lutter contre l'épidémie, mais est-ce un message à faire diffuser par les agences sanitaires ? Les risques sont grands, dans un continent ou la diffusion du préservatif reste trop faible et où les précautions oratoires du genre "toutes choses égales par ailleurs" ou "ce qui ne dispense pas de mettre un préservatif" vont vite se perdre, de légitimiser les rapports non protégés, sous prétexte qu'étant circoncis, la transmission de la maladie est moins probable.

  • Les abeilles aussi peuvent apprendre. Mais que reste-t-il aux organismes soi-disant supérieurs ?

  • Ajout du 29 mars : Une équipe canadienne est parvenue à lutter contre les bactéries résistantes aux antibiotiques, en se basant sur une protéine qui stimule les défenses immunitaires, plutôt que de s'attaquer directement aux bactéries. Sur le principe, on pourrait dire que cela ressemble à une vaccination non-spécifique - vaccination qui n'est normalement pas possible face aux bactéries. De plus, à la différence des antibiotiques utilisés habituellement, , la bactérie n'est pas visée directement : il est donc peu probable qu'elle développe une résistance par la suite. C'est une découverte très importante, dans un domaine où les ressources médicales commençaient à s'épuiser. Elle ouvre des perspectives dans la lutte contre les maladies nosocomiales (contractées à l'hôpital), en particulier contre les staphylocoques dorés multirésistants. (source ScienceBlog)

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mercredi, mars 28, 2007

Les modèles en science

Dans les débats à propos de la science revient souvent l'idée fausse que la science serait à la recherche de la vérité sur le fonctionnement du monde. Dans ce paradigme (trop) communément admis, il y aurait des théories qui seraient vraies, d'autres qui seraient fausses, et les meilleures théories actuelles ne seraient que partiellement vraies, en ce sens qu'une meilleure théorie, "plus vraie", pourrait toujours être formulée dans le futur. Le but de la science serait d'expliquer le monde, de répondre à la question "pourquoi les choses se passent-elles ainsi ?".

En réalité, la science essaie de décrire le monde, et le but de ces modèles et de ses théories est de rendre compte du monde tel qu'il est, ou plutôt tel qu'on le perçoit et le mesure. Les théories ne sont pas vraies ou fausses, elles sont seulement plus ou moins précises. Un modèle n'explique le monde que dans la mesure où il rend compte de façon précise des phénomènes observés, et qu'il nous permet de comprendre l'origine des phénomènes observés. Mais, si ce n'est pas le cas, peu importe : la science est là pour répondre au comment, pas au pourquoi.

Par exemple, en physique quantique, le modèle du spin ou la théorie de l'intrication ne nous éclairent pas vraiment sur l'origine des phénomènes observés - le spin est même plutôt contre-productif, dans le sens où il laisse imaginer des analogies avec la rotation autour d'un axe ("spin" en anglais) dans l'univers macroscopique matériel qui nous est familier, et qui sont fausses. Pourtant, ces deux constructions théoriques rendent extrêmement bien compte des expériences : qu'elles soient "vraies" ou "fausses" n'a aucune importance (ces mots n'ont pas beaucoup de sens), elles sont juste précises et utiles.

Un autre exemple est la modélisation des polymères. Les polymères sont de longues, très longues chaînes moléculaires, formées par l'addition successives de monomères : l'éthylène donne le polyethylène, le styrène donne le polystyrène, etc... Les matières plastique ou le caoutchouc en sont d'autres exemples. Le problème qui se pose est de savoir comment se meuvent ces longues chaines sous l'effet de la température ou d'une contrainte imposée au matériau. Une autre question est de savoir comment ils modifient l'écoulement d'un fluide dans lequel ils sont dilués. Et bien, pour certaines échelles de temps, les modèles les plus pertinents sont simplement de représenter le matériau par un ensemble de pistons et de ressorts ! Et à d'autres échelles de temps, il est intéressant de voir le polymère comme un ensemble de billes connectées par des ressorts.

Inutile de dire que ces modèles sont faux, et ne représente pas la réalité. Et pourtant, ils donnent des résultats théoriques assez précis. Ils représentent de toute façon ce qui se fait de mieux : ils sont donc vrais !

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dimanche, mars 25, 2007

Purification de l'eau

Ouf, je commence à y voir plus clair dans le travail - le blog, qui est vraiment passé à la trappe ces derniers temps, devrait être mis à jour plus régulièrement.


Le Monde m'aide bien, d'ailleurs, avec un article intéressant sur le problème du traitement de l'eau. Comment assurer l'accès à l'eau potable aux populations des pays du Tiers-Monde, en sachant que les toutes les solutions nécessitant un investissement important ou un certain niveau technologique sont irréalistes ?

J'avais déjà parlé de la catastrophe sanitaire qui touche les populations du Bangladesh, qui n'ont d'autres choix que de boire une eau empoisonnée à l'arsenic. Une solution serait d'adsorber l'arsenic sur des filtres tapissés d'oxyde de fer - je parlais de filtre basés sur des résidus de fumée, l'Unesco développe des sachets de sable, l'important est dans tous les cas d'offrir une importante surface de contact à l'oxyde de fer, à bas coût.

Le Monde parle aussi d'un projet testé en Ethiopie, la LifeStraw, un paille contenant des filtres mécaniques et chimiques. L'idée est séduisante, car elle semble répondre aux multiples contraintes : simple à utiliser et peu coûteuse, en particulier. Sa limitation me semble être l'impossibilité de l'utiliser pour, par exemple, dépolluer l'eau destinée à la cuisine.

Au-delà de la technologie, ce sont les décisions politiques qui vont déterminer les projets qui réussissent et ceux qui échouent. En effet, si le prix de ces dispositifs doivent être le plus faible possible, c'est plus pour que les organisations humanitaires occidentales puissent en acheter de grandes quantités, que pour permettre l'achat direct par les populations concernées. Il y aurait matière à critique sur le côté attentiste de certains pays africains (le Monde parle du Mali, mais il était sûrement possible de trouver un exemple moins pauvre). Il faut aussi et surtout souligner que bien que les sommes en jeu, pour le test, le développement et la diffusion de ces solutions soient ridicules du point de vue des pays occidentaux, elles restent hors de portée des organismes humanitaires, qui doivent chercher, avec plus ou moins de succès, des "sponsors" privés.

Et je ne peux pas finir sans évoquer les chiffres donnés par le Monde. La consommation quotidienne par personne moyenne d'eau à usage domestique s'élève en Afrique à 10 à 40 litres, à 50 à 100 litres en Asie, à 250-350 litres en Europe, et à 600 litres en Amérique du Nord. Je suis étonné et choqué de la différence entre Europe et Amérique du Nord. Elle n'est pas explicable en terme de niveau de vie, mais bien par des comportements de gaspillage. A titre d'exemple, la différence entre un bain et une douche, c'est 40 litres, et entre un bain "raisonnable" et un bain avec la baignoire remplie à ras bord, c'est encore 40 litres. Il y a là une piste sérieuse à creuser pour quiconque se demande quels sont les gestes simples et efficaces pour limiter son "empreinte écologique".

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lundi, mars 19, 2007

Quand le Monde analyse l'EPR

Ce qui est bien avec les journaux, en France, c'est qu'on est beaucoup mieux informé que par les autres sources. Les grands quotidiens de références, comme le Monde, ont à la fois la place de développer les sujets que n'ont pas les journaux télévisés, la qualité rédactionelle que n'ont pas les quotidiens gratuits distribués à la sortie des métros, et le professionalisme qui tranche avec le "n'importe quoi" que l'on trouve sur internet.

Non, je plaisante, bien sûr.

Dans le débat actuel sur l'EPR, le Monde a ainsi publié en ligne une citation par candidat, résumant sa position. Certains sont pour, certains sont contre, d'autres ménagent la chèvre et le chou et appellent à plus de débat. Ce tour d'horizon lapidaire, pompeusement intutilé "Les clefs", accompagnait un article parlant des manifestations contre ce programme de centrale nucléaire de nouvelle génération. Les explications à la fin de l'article sont, in extenso, les suivantes :

Le réacteur pressurisé européen (EPR, de l'anglais European Pressurized Reactor) a été conçu et développé par Areva NP. Ses objectifs affichés sont d'améliorer la sûreté et la rentabilité économique par rapport à celles des précédents réacteurs à eau pressurisée.Pour ses détracteurs, l'EPR est dangereux, coûteux et aggrave le problème des déchets radioactifs.

Nous voilà bien avancés. Vous savez ce que c'est, vous, l'EPR ? Moi pas. Et le Monde ne m'aide pas vraiment à me faire une idée.

Mon premier reflexe, dans ces cas là, est d'aller sur Wikipédia. On y apprend, entre autre, que le réacteur EPR dispose de deux éléments de sécurité supplémentaires majeurs par rapport aux centrales actuelles, une enceinte de confinement en cas de fusion du coeur, pour l'empêcher de crever le fond de la cuve, et une enceinte extérieur pour prévenir les fuites de matière radioactive en cas d'accident. Les dispositifs de sécurité habituels ont été multipliés, avec par exemple quatre systèmes de refroidissement.

Alors, j'ai bien l'impression de parler comme le directeur de la centrale nucléaire dans le sketch des Inconnus, mais la sécurité semble vraiment être améliorée dans ce dispositif.

La page présente aussi les arguments habituels du débat pro-/anti- nucléaire. Les pro mettent en avant le fait que ce réacteur nucléaire est plus sûr, ne dégage pas de gaz à effet de serre, et est économiquement très intéressant par sa capacité à utiliser du MOx, combustible appauvri. Les anti parlent de l'absence de risque zéro (ils pointent en particulier la possibilité d'explosion de vapeur sous pression), de la nécessaire économie d'énergie préférable à la construction de centrales, et du développement de sources d'énergie alternatives et propres. Et, ce qui ressort de tout ça, c'est surtout l'incapacité totale et habituelle des pouvoirs publics de conduire ce débat dans la transparence : le débat public, qui n'était pas un modèle de discussion contradictoire, s'est déroulé après le vote des parlementaires.

Mon opinion personnelle est qu'il vaut mieux miser sur le nucléaire que sur les énergies fossiles, à cause du problème du réchauffement climatique. C'est une solution pragmatique , qui doit s'accompagner d'un investissement massif dans la recherche de solutions plus propres, de technologies pour le traitement des déchets, et dans la fusion (ITER). Cela ne nous dispense pas de travailler dans le sens des économies d'énergies, mais toute autre solution me semble, à court terme, être irréaliste. Et, dans ce contexte, je préfère autant avoir des centrales nucléaires modernes et sûres.

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mardi, mars 13, 2007

Le bon maïs de Monsanto

Vous avez certainement lu l'article de Timothé, intitulé Les OGM sont-ils dangereux pour la santé, l'étude qui désinforme. Si ce n'est pas le cas, courez-y : il y met en évidence les failles dans l'argumentaire du journaliste de Canal+ dans ce documentaire consacré au maïs transgénique MON863 de Monsanto, le manque de rigueur scientifique, la partialité, la facilité de jouer sur les peurs plutôt que de raisonner. Le verdict est sans appel : le documentaire est manipulateur, si ce n'est menteur. Les scientifiques cités "à charge" dans le documentaire ont d'ailleurs réagi avec violence à la déformation de leurs propos sortis de leur contexte.

Mais, il y a un mais.J'ai l'impression que nous touchons là à la limite de la démarche scientifique que les membres du c@fé des sciences cherchent à défendre. En effet, je sens en moi deux courants apparemment contradictoires.

D'un côté, je partage parfaitement cette indignation devant ce reportage de mauvaise qualité, qui m'a fait bondir de mon siège à plusieurs reprises. Ces journalistes, qui prétendent rechercher la vérité, déforment les propos recueillis et malmènent les statistiques pour coller avec leur objectif, "se payer" le Grand Méchant Monsanto. L'objectif des OGMs est de produire des variétés de plantes qui nécessitent moins de produits chimiques (herbicides ou pesticides) pour leur entretien, qui offrent de meilleurs rendements, ou qui s'adaptent à des conditions climatiques difficiles. Dans tous les cas, ces qualités se retrouvent dans le prix final, et, si la qualité ne diminue pas, le consommateur y gagne. Il faut aussi mentionner les perspectives de développement de l'agriculture dans les pays du Tiers-Monde et ceux à forte croissance démographique.

Mais d'un autre côté, en tant que consommateur, je ne souhaite pas que les OGMs se généralisent. Le principal danger n'est pas, de mon point de vue, la santé, car je pense qu'aucun produit toxique à grande échelle ne sera autorisé. Non, le problème viendrait surtout que les firmes comme Monsanto concentrent et concentreront leur offre sur un petit nombre de variétés, moins coûteuses, plus productives, plus résistantes aux parasites, aux produits chimiques ou aux conditions climatiques. Or, tout ce qui va dans le sens d'une perte de variété, dans le sens d'une industrialisation croissante de l'alimentation, me semble néfaste à long terme. Les effets négatifs sont, par exemple, une résistance aux nouvelles maladies ou aux parasites réduite, ou l'effacement du goût et de la valeur nutritive devant la rentabilité de la culture. Ces tendances s'affirment déjà fortement sans que le OGMs ne soient généralisés, du moins en Europe, alors je ne pense pas qu'il soit bon de creuser cette voie.

Me voilà donc devant un dilemme. D'un point de vue politique, je devrais soutenir le reportage de Canal+, qui est un brûlot combattant la plantation d'OGMs. De la même façon, je devrais applaudir quand, entre autres bêtises, les faucheurs d'OGMs détruisent une plantation vieille de 7 ans, faisant partie d'un test scientifique visant à mesurer la dissémination des gènes à l'échelle de dix ans.

Et bien non, désolé, je ne peux pas. Je pense que c'est pour cela qu'aussi peu de scientifiques font une carrière politique : les déformations professionelles qui consistent à s'intéresser à la vérité, admettre que l'on peut avoir tort et éviter les dogmatismes faciles sont des défauts encombrants.

J'en arrive à un deuxième problème, qui a provoqué ce billet. D'après cet article du Monde, le traitement statistique par le Criigende l'étude de toxicité de Monsanto (obtenu par Greenpeace après une procédure judiciaire) avérerait l'existence d'effets secondaire sur l'organisme de rats nourris au maïs transgénique. La non-corrélation entre dose de maïs transgénique ingérée et intensité des effets, le fait que l'effet sur les mâles est différent de celui sur les femelles, et la grande variabilité naturelle des paramètres observés, rendent l'interprétation difficile. Le Criigen, financé par Greenpeace, crie bien sûr au loup. Monsanto, de son côté, ne nie pas les écarts statistiques observés, mais, avec la Commission au Génie Biomoléculaire, affirment qu'il n'y a pas toxicité ou qu'il n'y a pas de lien avec l'OGM. En tout cas, le débat scientifique a (enfin) lieu, et le moins que l'on puisse espérer, c'est que de nouvelles études soient menées avant toute commercialisation. Il est toutefois regrettable qu'ait fallu en passer par l'activisme d'un groupe que je ne porte pas particulièrement dans mon coeur, Greenpeace, pour débloquer la situation.

Il faut de tout, semble-t-il, pour faire un monde...

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lundi, mars 12, 2007

Publicité

J'utilise depuis un certain temps le compteur de visites de Weborama, qui est plutôt satisfaisant. Toutefois, je me suis rendu compte qu'il faisait apparaître un pop-up à l'écran, en plus d'une publicité à gauche, et c'est agaçant. J'ai l'impression que c'est assez récent, ou j'ai peut-être mal réglé les options de Firefox 2. Toujours est-il que si le problème continue, je vais vite m'en débarasser.

Non mais...

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Ganesh avait soif

En me promenant un peu dans les allées de Wikipédia, je suis tombé sur cette histoire amusante : en 1995 en Inde, des statues de dieux hindous, comme Ganesh, se sont mises à boire le lait qui leur était offert. La nouvelle a provoqué un bel émoi en Inde et dans les communautés hindous dans le monde, et certains groupes n'ont pas tardé à récupérer le phénomène en parlant de miracle.

D'un point de vue physique, l'explication rationelle se nomme capillarité. Ce phénomène, qui intervient aussi pour expliquer la forme des gouttes d'eau sur une vitre, quantifie la préférence énergétique qu'ont les molécules d'eau à rester entre elles, plutôt que de se placer à l'interface avec l'air ou avec le support.

Une expérience simple peut aider à comprendre le phénomène des "statues buveuses" : procurez-vous une paille la plus fine possible, et plus ou moins transparente, et placez-la dans un verre à moitié rempli d'eau. Vous observerez deux choses : l'eau se déforme au contact des parois de la paille, vers le haut, et le niveau de l'eau augmente dans la paille. L'explication est la suivante : la déformation en ménisque de la surface de l'eau dans la paille crée, d'après la loi de Laplace, une dépression, qui compense un peu la gravité et qui élève le liquide.

Cet effet est d'autant plus fort que le tube est petit : ainsi, si les statues sont faites d'un matériau poreux avec des trous micrométriques, il n'est pas étonnant qu'elles "boivent" le lait. Je ne sais pas en quel matériau sont faites ces statues, ni quelle est la peinture (potentiellement inhibitrice du phénomène) dont elles sont recouvertes, mais l'hypothèse de la capillarité a été testée au moins une fois. Des liquides teintés ont été eux aussi absorbés, et ont immédiatement coloré la statue autour de sa bouche. Le liquide ne disparaissait donc pas mystérieusement, et la capillarité semble bien être à l'oeuvre.

Cette histoire est instructive d'un point de vue sociologique. La première fois que le lait a été mis en contact avec la statue, sa disparition a créé la surprise. Personne ne s'attendait vraiment à ce que les dieux consomme réellement la nourriture, si ? Mais, qu'en est-il maintenant, les statues absorbent-elles toujours le lait ? Peuvent-elles aussi le boire par les cheveux ou les bras, aussi bien que par la bouche (cela ne devrait pas faire de différence au niveau capillaire) ? Le matériau dont sont faites les statues a-t-il ces propriétés ? Voilà un certain nombre de questions simples et efficaces que, je n'en doute pas, de nombreux fidèles indiens ont posé. Mais apparement, comme souvent dans ces phénomènes de masse où se mêlent ferveur religieuse, propagation de rumeurs et hystérie collective, ils n'ont pas vraiment été entendus.

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mardi, mars 06, 2007

La religion, chez Koz

Pure coïncidence, quand je sortais mon billet qui s'interrogeait sur les raisons qui poussent les gens à croire à une religion, Koz faisait de même. Son point de vue de catholique fait que les réponses qu'il apporte sont bien différentes, et c'est d'autant plus intéressant.

Cela prouve en tout cas que les croyants ne sont pas simplement des personnes qui cherchent des solutions simples à des problèmes compliqués. Les questions métaphysiques sont par définition en dehors de la science, et, en l'absence d'aucune possibilité de les vérifier, chacun peut y apporter la réponse qu'il veut. La question se pose, par contre, quand les religions prétendent expliquer des éléments qui sont du registre de la science : c'est dans ce cas que les dogmes sont intellectuellement limitants. L'explication rationelle à l'apparition de la vie, basée sur l'évolution naturelle, est bien plus intéressante que les genèses des différentes religions. Elle peut être critiquée, débattue, modifiée, alors qu'il n'est possible de dire autre chose, devant la Bible des chrétiens, les enseignements du Bouddha, ou les mythologies des Romains ou des Vikings, que "j'y crois" ou "je n'y crois pas".

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lundi, mars 05, 2007

Les religions et nous

Malgré le silence assourdissant sur ce blog, je m'intéresse à la question de l'attrait de la religion (quelle qu'elle soit), non pas pour les valeurs qu'elle peut défendre, mais dans ce qu'elle a de plus irrationnel. Pourquoi croyons-nous ? Pourquoi l'idée de Dieu est-elle si forte ?


Ainsi, je connais une personne, de très haut niveau d'études, qui m'a récemment déclaré "ne pas croire en l'évolution". Cette personne pense que la Genèse est une description factuelle de la création du monde. Comme l'hypothèse de la simplicité d'esprit ou de la crédulité ne peuvent être invoquées, il faut admettre que les idées religieuses ont un attrait suffisant pour supplanter les idées plus rationnelles. Cela me rappelle Why People Believe Weird Things, sur l'ufologie et le paranormal, de Michael Shermer, et en particulier le chapitre Why Smart People Believe Weird Things. Loin de moi l'idée de mettre sur le même plan l'ufologie et les religions sur le même plan : le rapport à la rationalité n'est pas la même (il y a un monde entre le conspirationnisme et l'histoire de Saint Thomas), et les valeurs véhiculées ne sont pas les mêmes. Mais, tout de même, les raisons d'y croire, par exemple le désir d'expliquer le réel y compris dans sa dimension inaccessible à la science, ou la croyance en un registre supérieur à l'expérience matérielle, permettent de dresser un parallèle. Et, dans les deux cas, si un mépris trop rapide tente de discréditer les croyants - la religion est l'opium du peuple, les ufo-believers sont des pigeons - un regard plus patient verra que les personnes les plus éduquées et les plus intelligentes dans les autres parties de la vie se laissent elles aussi séduire.

Un article du New York Times tombe fort à propos pour enrichir cette réflexion. L'auteur mentionne deux idées, qui ne sont pas forcément liées mais qui sont également intéressantes.

La première est que nous serions "câblés" (nos neurones seraient organisés par nos gènes) pour attribuer une intention à un mouvement, ou une cause à une conséquence. Ce qui pouvait être un avantage évolutif décisif, par exemple en attribuant le mouvement de hautes herbes à un prédateur, se révélerait être aussi une source puissante de superstition, quand il s'agit de trouver la cause d'un phénomène comme l'éclair, le feu, la vie, ou, pour aller plus loin, l'existence de l'univers. Chercher un agent responsable de la causalité pousse à croire aux dieux pour les phénomènes naturels, à un Dieu supérieur pour l'origine des choses, ou à des êtres venus de l'espace pour des bizarres petites lumières dans la nuit.

La deuxième est que la religion - au sens large, on pourrait y inclure la politique quand elle tourne au dogme - est bénéfique d'un point de vue évolutif. En apportant des réponses simples à des problèmes a priori insolubles, elle diminue le stress. En rassemblant les individus autour de rituels, elle soude les communautés. Les individus les plus aptes à "croire" aurait donc été sélectionnés par l'évolution.

Autant la première explication me semble pertinente, autant le deuxième me paraît contestable. Je pense que c'est typiquement ce que Richard Dawkins décrirait comme étant chercher à trouver une explication génétique à une sélection naturelle mémétique. J'ai développé cette argumentation dans ce billet sur la mémétique, mais, pour résumer, je dirais que je ne pense pas que l'idée de la religion puisse avoir une influence évolutive, les dogmes n'étant pas corrélés avec l'intérêt des gènes.

Quelle est votre expérience personnelle sur le sujet ? Avez-vous déjà discuté avec des gens dont les croyances heurtaient de plein fouet ce que vous considérez comme rationel ? Si vous êtes croyants, accordez-vous de l'importance aux rituels (je connais par exemple des personnes très pieuses qui vont prier à la messe mais qui ne participent à presque aucun autre rite catholique) ? Voyez-vous la religion comme un élément de la vie collective, ou comme une dimension personnelle ?

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vendredi, mars 02, 2007

La question du libre arbitre revient chez Pikipoki

Pikipoki remet le couvert sur la question du libre arbitre. Il est question de la façon dont nous formulons nos choix, et de l'âne de Buridan. Comme souvent, je ne suis pas d'accord avec lui, mais comme toujours, c'est passionant à lire. Continuons la discussion chez lui !

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